Tout va bien – j’ai laissé mon fils seul.

Le Petit Prince a Dit : « Laisse-moi, je vais attendre les copains dehors… »

C’était ce matin, nous étions en avance devant le collège, et j’ai laissé mon fils attendre seul à l’extérieur que la cloche sonne et qu’il puisse rentrer dans l’établissement.  Je l’ai fait.

Il y en a beaucoup d’entre vous qui comprendront ce que cela signifie, dans notre chair. Oh, j’ai protesté un peu quand même, je voulais voir où il allait attendre, mais il m’a fait un signe d’agacement de la main et j’ai compris que j’allais un peu trop loin, je me suis sentie de trop. Alors je suis partie, j’ai jeté un rapide coup d’oeil, il ne me regardait pas. Mon fils a grandi, je m’en étais rendue compte physiquement mais là, c’est aussi intérieurement.

J’ai laissé mon fils seul, et je n’ai pas eu peur. Je n’ai pas eu peur des aggressions, des moqueries, qu’il ne s’enfuie, qu’il fasse une crise. J’irai le chercher tout à l’heure et je n’ai même pas peur. Je sais qu’il aura retrouvé un ou deux copains avant de rentrer, qu’ils se seront rendus dans leur classe ensemble, qu’il y aura retrouvé Justine, son AVS, qu’il aura essayé du mieux qu’il peut de suivre les cours et de prendre des notes, et que quand j’irai le chercher à midi, il me racontera des trucs au sujet de ses copains et des profs.

On rentrera à la maison, on préparera le repas, il mettra la table, on déjeunera et je le laisserai jouer avec son chien. Puis je regarderai son cartable, en ressortirai un amas de classeurs et de feuilles non rangées, je trierai, perforerai,collerai, mettrai à leur place les cours et documents ; je regarderai le cahier de texte, les documents à signer et les devoirs à faire. Alors on montera tous les deux dans sa chambre, je lui préparerai ses affaires, remplirai les classeurs de feuilles vierges, pendant qu’il fera ses devoirs. Je vérifierai qu’il a tout le matériel nécessaire dans sa trousse, noterai ce qui manque.

C’est d’un banal.

Merci cette banalité.

Elle a été absente de notre vie pendant si longtemps… trop longtemps.

Je n’ai pas eu droit à ça pendant des années, le téléphone rivé dans mes jeans, sous mes yeux pendant les réunions, « au cas où » il arriverait quelque chose. Je vivais dans la crainte d’un drame à l’école, et c’est ce qui a fini par se produire d’ailleurs, j’avais raison de me méfier. Mais aujourd’hui… c’est si loin  tout ça !

Je m’arrête là, ça me remue beaucoup quand même (trop de bonheur, haha !) mais tout ça pour dire : ne perdez pas espoir, vraiment. Vous devez vous aussi croire qu’un jour vous pourrez souffler, vous n’aurez plus peur pour votre enfant. Il va grandir, vous devez le regarder grandir et évoluer. Et vous émerveiller.